Petit billet d'humeur vagabonde
Publié le 9 avril 2014
Un petit billet d’humeur vagabonde en ce samedi 5 avril 2014, à trois mois de mon changement définitif de vie et de statut …
Il y a une dizaine de jours, j’ai eu confirmation que les futurs acquéreurs de ma maison avaient bien obtenu leur prêt … nous devrions signer l’acte de vente dans un mois … Quelques jours plus tard, je recevais un courrier de confirmation comme quoi mon dossier de retraite était définitivement enregistré …
Je me sens en transit, ni ici ni ailleurs, entre deux eaux …
Je n’arrive pas à me mettre dans l’action pour avancer dans les préparatifs de déménagement, comme d’hab’ j’attends le dernier moment, après tout, c’est comme ça que je fonctionne et en général ça marche bien ainsi pour moi … pour l’instant, j’apprécie simplement de savoir que ces deux points essentiels, vente de la maison et dossier de retraite sont quasiment bouclés et sûrs …
Je me familiarise avec ma nouvelle voiture, et dans une quinzaine de jours, elle va me servir de « camion de déménagement », je verrai comment elle se comporte chargée … Dans un mois j’aurai ma caravane fin prête, et je ne sais pas encore où je m’installerai pour terminer mon année scolaire (oui bingo … je suis enseignante, enfin, plus que pour trois mois …), le plus probable étant d’aller dans le charmant petit camping en face duquel j’ai habité pendant deux ans (de l’été 2011 à l’été 2013 : j’adorais regarder de ma fenêtre l’arrivée des touristes, en camping-car ou en caravane) …
Côté travail, je me détache de plus en plus, ce qui est sain je pense … mais un peu inconfortable à vivre au quotidien, la passion n’y étant plus … il y a quelques mois, je pensais emmener avec moi de quoi travailler avec les gens du voyage, au hasard des rencontres, car c’est actuellement ce que je fais : enseignante auprès des enfants du voyage, j’avais prévu garder ma valise pédagogique et une petite caisse d’albums pour enfants, mais cette idée a passé … mon projet évolue …
Lorsque j’ai décidé de prendre ma retraite et de voyager, c’était dans le but de sillonner quelques régions de France en vue de trouver l’endroit où je voudrais me poser … j’aspirais alors à rejoindre des personnes vivant en habitat groupé, plutôt en zone rurale, et plutôt dans la moitié sud de la France … afin de pouvoir faire mon choix, il me fallait connaître différents lieux, différents groupes, afin de savoir où j’allais me trouver bien et en affinité … il se trouve que j’ai rencontré pas mal de personnes depuis cet été qui sont dans ces projets (soit d’habitat groupé, soit de nomadisme !), et que mon réseau humain a commencé à se constituer avant l’heure prévue … j’ai aussi découvert des moyens d’élargir mon réseau de connaissances, ainsi que mes connaissances et savoir-faire, notamment en remontant mes manches dans des chantiers participatifs d’éco-constructions, ou en faisant du wwoofing (travailler quelques heures par jour sur des périodes de une à plusieurs semaines dans des milieux écologiques, cultures bio, en échange du logis et du couvert, et dans le partage des connaissances) …
Par ailleurs, je suis en lien d’amitié avec des personnes qui sont en train de s’organiser pour créer des lieux de vie, en affinité avec mes propres aspirations, cependant, je ne me sens pas pour l’instant de m’investir avec elles dans l’un des projets : le mien étant en constante évolution …
Je me sens de plus en plus appelée à « voyager pour voyager » ou plutôt à voyager comme mode de vie intrinsèque, et non pour trouver un endroit où me poser … j’en suis venue à penser il y a quelques mois, que j’aurais peut-être envie d’avoir deux - ou pourquoi pas trois – lieux de vie … et que je naviguerais peut-être de l’un à l’autre … actuellement, je ne suis pas sûre que ce soit ce que je cherche … actuellement, je sais que j’ai besoin de vivre quelque chose d’intermédiaire entre ma vie actuelle qui se termine (sédentaire et salariée) et celle qui va se profiler dans l’avenir et dont j’ai de moins en moins idée !!! …
Pour l’instant j’ai envie de faire ce que je ne voulais pas faire il y a six mois : du tourisme … pour l’instant, j’ai envie de faire du tourisme pendant un ou deux ans, ce qui me semble être comme une sorte de sas entre deux modes de vie … j’ai tellement envie de connaître les merveilles de notre pays, du nord au sud, d’est en ouest, ainsi que les espaces plus lointains de l’Europe … j’ai envie d’ humer l’air partout, d’apprécier les lumières de différentes régions, de créer des contacts avec les « gens de pays », de découvrir les traditions, mais aussi d’être suffisamment disponible pour que mon intuition me mène là où il faut quand il faut, car « être au bon endroit au bon moment » est l’une de mes devises … mon voyage bien sûr n’est pas que touristique, il est aussi initiatique (avant tout initiatique …), fait pour me faire grandir en conscience, et là aussi, les rencontres, les « bonnes » rencontres sont primordiales pour avancer sur ce chemin d’évolution et de connaissance de soi …
Dans ma jeunesse, lorsque je rêvais d’être ethnologue, je voulais travailler sur « La Route de la Soie » … une amie a dit récemment de moi que j’allais prendre « La Route du Soi », elle ne pouvait pas dire mieux …
En attendant, je profite des derniers moments dans ma maison spacieuse, calme et baignée de lumière, et dans son environnement, je fais chaque jours mes ballades avec ma petite chienne Plume, observant la nature qui s’éveille après des mois de sommeil, c’est fantastique de me promener au milieu de ces plants éparpillés de colza qui grandissent de jour en jour dans ce champ en jachère … chaque soir je salue le soleil qui se couche à l’horizon, toujours un peu plus loin vers l’ouest, la nuit, je contemple la belle constellation d’Orion qui avance à grand pas vers l’horizon et qui dans quelques semaines aura disparu du ciel pour laisser place au grand triangle de l’été ( Altaïr, Vega et Deneb) … je ne manque jamais de saluer les amis des Pléïades, petit bijou délicat à côté du colosse Orion … la « star » de cet hiver fut Jupiter, dans la constellation des Gémeaux, on ne voyait que lui, entre Castor et Pollux, maintenant, Mars s’invite à la tombée de la nuit, habillé de sa belle lumière orangée … Les chemins détrempés et boueux de cet hiver redeviennent fermes, l’herbe y repousse et se densifie, et se parsème d’adorables pâquerettes et pissenlits … les haies de pruneliers en fleurs embaument l’air d’un parfum suave et tonifiant à la fois, pour ma mémoire olfactive, « le vrai parfum du printemps » … la campagne se revêt d’un habit de nuages blancs et vert tendre … (Tiens, je me prends pour Charles d’Orléans* …) j’emmagasine les sensations de ce renouveau et les mémoires agréables de cette campagne qui fut « ma terre » pendant 19 ans, je l’honore de mes appréciations, je lui exprime ma gratitude et en même temps ces flâneries sont aussi une sorte d’adieu, car je ne pense pas que je reviendrai ici plus tard … j’ai des amies dans le secteur que je viendrai voir de temps en temps, mais je ne sais pas si je reviendrai sur ces lieux où j’ai vécu de belles années … il faut aussi savoir passer à d’autres choses, et ne pas s’attacher : le monde est ma maison, la Terre est « ma terre » …
… à bientôt …
* Charles d’Orléans : « Le temps a laissé son manteau … »
Le temps a laissé son manteau...
Le temps a laissé son manteau
De vent, de froidure et de pluie,
Et s'est vêtu de broderie,
De soleil luisant, clair et beau.
Il n'y a bête ni oiseau
Qu'en son jargon ne chante ou crie:
« Le temps a laissé son manteau!
De vent, de froidure et de pluie, »
Rivière, fontaine et ruisseau
Portent, en livrée jolie,
Gouttes d'argent, d'orfèvrerie;
Chacun s'habille de nouveau.
Le temps a laissé son manteau
De vent, de froidure et de pluie,
Et s'est vêtu de broderie,
De soleil luisant, clair et beau.
Charles d'Orléans
(1394/1465)
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