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Les carnets de La Nomadeuse
30 janvier 2016

La Nomadeuse se pose (1)

Voilà … Pour moi, pour l’instant, le voyage s’arrête … j’ai besoin de me poser …

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Illustration de Lucie Vandevelde

Le voyage reste important pour moi, mais je pense que je vais le vivre d’une autre façon, moins radicale …

Déjà cet été, j’avais eu des projets de « resédentarisation », mais faute d’avoir trouvé d’un claquement de doigts mon petit coin de paradis, j’avais repris la route … de toute façon, ça me démangeait … une fois requinquée auprès de mes proches, j’avais envie de repartir, et puis il y avait Anka, mon amie d’enfance et de jeunesse, que j’avais retrouvée grâce au web … et cette envie de vivre un peu l’Allemagne …

C’est bien, j’ai adoré mon périple en Allemagne, mais sur le retour en France – et tout bêtement après avoir été privée de mon petit appareil photo – je n’ai plus eu de motivation …

Les questions latentes, que je m’étais déjà posées au printemps dernier seront revenues plus fort que jamais : Qu’est ce que je fais de ma vie ? Quel sens je lui donne ? A quoi je sers ici bas ? etc … bref, des questions existentielles …

En dehors de ces questions, il y avait aussi ce sentiment d’isolement … j’en avais déjà parlé en début d’année, quand j’étais au Portugal … sentiment d’isolement qui rejoint les questions existentielles, puisque je me sentais en dehors de la vie sociale, donc peu utile … plutôt que dire la vie sociale, je devrais dire une vie sociale, car il n’y a pas un modèle de vie sociale, et celui qui prédomine dans notre société – qu’on pourrait étiqueter par facilité « la » vie sociale ne m’intéresse pas forcément … pour moi, une vie sociale, c’est une vie où l’on interagit avec d’autres, dans un environnement particulier, plus ou moins large, où l’on développe des projets, où l’on s’engage, où l’on donne et l’on reçoit, où l’on tend vers un ou des buts communs, à court et long terme … et on sait quelle est notre place, qui peut évoluer, bouger, mais on a sa place, la place qu’on se fait, et qu’éventuellement on peut quitter …

Moi, éventuellement, ma place c’était « touriste » (donc, consommatrice) … mais être touriste à plein temps, c’est super pesant … au quotidien, mes contacts sociaux étaient restreints, fugaces et souvent très superficiels …
Bref des contacts sociaux sans grand intérêt …

Il est vrai que j'ai dévié de mon projet d’origine, qui était de « tourner » en France, pour rencontrer des gens vivant en habitat groupé, appliquant de nouvelles méthodes de vie plus respectueuses de l’environnement et plus épanouissantes sur le plan humain, afin de voir dans quel projet je pourrais m’insérer durablement … mais très vite, j’ai eu envie de découvrir de nouveaux paysages, aller à la rencontre des pays d’Europe, et éventuellement faire des rencontres humaines à l’occasion d’épisodes en travail volontaire … je l’ai fait un petit peu, mais j’ai trouvé la formule « workaway » trop contraignante, et, dans mon expérience, pas toujours adaptée à la découverte de us et coutumes locales … (les anglais en Espagne ou les allemands au Portugal, c’est sympa, mais pas localement immersif…)

Je savais bien avant le départ, que je rencontrerais ces moments de solitude totale, c'est-à-dire isolement social et solitude affective – je ne parle pas forcément d’une relation de couple, mais simplement de relations détendues et complices entre amis, ou en famille : se remémorer des bons moments, se raconter la journée, rigoler, manger ensemble, etc … Au tout début du voyage, je l’ai ressentie cette solitude affective : je quittais mes proches, mes amis, mes collègues … et puis, l’attrait de l’aventure m’a rapidement permis de la surmonter … mais au bout de plusieurs mois, sans jamais de partage complice, avec ce statut un peu bizarre vu de l’extérieur (que ce soit en camping, ou dans un resto, si on est seule, et on nous regarde, en tant que personne seule, et en général, ça ne facilite pas les rapports … dans les campings, au mieux on m’admirait en me plaignant mais on ne m’invitait pas à dîner, au pire on me disait qu’heureusement j’avais les chiennes à qui causer … et la plupart du temps c’était bonjour-bonsoir-il fait beau-il va pleuvoir)

L’autre aspect de ma vie en camping – car là est surtout le nœud du problème, car quand je stationnais chez des hôtes, déjà, la qualité de vie sociale était différente – l’autre aspect donc, c’est que malgré l’isolement social, malgré la solitude affective, eh bien, je n’étais jamais seule !!! Comprenez par là, jamais tranquille … (si, c’est arrivé parfois : il est arrivé que je sois absolument seule sur des terrains de campings …) En camping, on est toujours sous le regard de quelqu’un, pas question de se balader à poil ou de lécher son assiette, pour ne donner que dans les exemples triviaux … Le pire, c’est quand les emplacements sont exigus, on vit les uns sur les autres (c’est pourquoi j’ai quitté si vite Freiburg : camping cher et surpeuplé avec emplacements minuscules), alors là, c’est comme si on vivait chez les voisins : télé, râclements de gorge, bruits de casseroles, ronflements, on a droit à tout (et soi-même on fait bien attention de ne pas faire de bruit …) … et le pire du pire … devinez … vous êtes dans un camping presque vide, vous goûtez enfin à une certaine quiétude, et on vient s’installer juste à l’emplacement près du vôtre ! … le pompon, c’est quand il n'y a pas d'emplacements délimités ... c'est ce qui m’est arrivé à Husum en Allemagne ( heureusement je partais le lendemain) ce superbe camping avec vue sur la mer, etc, de la place partout sur les côtés, eh bien on est venu se mettre à 60 cm de ma caravane (derrière en plus, heureusement : il faut être totalement stupide de se priver de la belle vue) et le tendeur de leur auvent passait au-dessus de ma tête d’attelage, il faut le faire … quand je suis rentrée de balade, j’ai halluciné … autant vous dire que j’ai laissé les chiennes chahuter dans la caravane ce soir là, et que j’ai terminé mon rangement bruyamment pour dégoûter les envahisseurs-crétins …

… et avec cette anecdote j’en viens à ce qui m’a fait réagir et décider d’arrêter : j’étais en train de devenir … misanthrope !!! Depuis quelques semaines, je ne supportais plus les gens, qu’à la fin je voyais systématiquement comme des emmerdeurs qui venaient me faire ch … là, je me suis dit « Arrête, ça ne va plus du tout … »

Enfin, tout cela pourrait être supportable, quand on sait que c’est passager, mais moi, avec ce choix de vie que j’ai fait, je sais que c’est comme ça en permanence, et que je n’ai aucun endroit où je puisse me réfugier et me requinquer … au départ, je pensais me sentir chez moi partout, et au fil des mois, je me suis sentie chez moi nulle part … Le fait de partir sans avoir un petit coin bien à soi, un port d’attache, un refuge, un havre de paix, c’est finalement très difficile à vivre …

Bon, avant de passer à la suite (le présent et éventuellement quelques projets d’avenir) je résume :
J’arrête le voyage, du moins sous cette forme, car je n’y trouve plus de sens … j’ai besoin de m’inscrire dans un cercle social auquel je participe activement, y apporter mes qualités, y être reconnue, être dans l’échange fructueux et épanouissant …
Je me suis beaucoup fragilisée intérieurement, malgré les apparences … je me suis aperçue de cela quand j’ai décidé d’arrêter : c’est en m’arrêtant que j’ai ressenti qu’émotionnellement je commençais à être fragile face aux autres ou aux situations imprévues … et que je n’étais pas prête à repartir comme ça, pendant des mois, et en solo … ça, je l’ai ressenti aussi lorsque Zohra a passé quelques jours avec moi fin novembre : nous avons roulé dans des conditions particulièrement difficiles (j’en ferai un article, ça vaut le coup), faire ça toute seule aurait été encore plus stressant …

Le voyage d’une certaine façon s’est transformé en errance …
De cela tout de même j’ai tiré des enseignements, mais j’en parlerai un peu plus tard …

D’autres raisons encore m’ont poussée à arrêter et à me poser, mais elles sont moins fondamentales, j’en parlerai aussi …

J’ai eu beaucoup de mal à me mettre à cet article : souvent je me disais, allez, assieds-toi et rédige-le, mais le cœur n’y était pas en plus de tout ce qui m’a occupée ces derniers temps … maintenant je crois que je suis sortie de cet état émotionnel fragilisé, c’est pourquoi j’ai pu l’écrire d’une traite … il a pris cette forme, il aurait pu être autrement aussi, c’est ce qui est sorti de ma tête et de mon cœur en cet instant précis …

La suite très bientôt !!!

 Le blog ne s'arrête pas, je le garde et je le "poursuis"… car se poser fait partie du voyage, et de l'expérience de la Nomadeuse ... de plus, ici, sur cette terre où je me pose actuellement, il y a de quoi explorer: de beaux reportages en perspective (hum, quand mon apn sera réparé), et comme je le disais plus haut, le voyage reste important pour moi, j'irai encore par monts et par vaux, en découverte de nouveaux lieux, ici en France et au-delà ... en revanche, le blog retrouvera je pense sa diversité du début et probablement de nouvelles rubriques ... je pourrai aussi partager quelques escapades allemandes ou françaises des mois de novembre et décembre (en évitant ce qui aurait trop à voir avec les traditions de noël ... trop tard ... )

Je mènerai aussi mon projet 365 de l'année 2015 à terme, avec la dernière vidéo de décembre qui est en gestation ... ensuite, je pense que je ferai des vidéos plutôt thématiques ... (car j'y ai pris goût, à ce petit jeu ...)

NB Après avoir relu la page que j'ai mise en lien (projet d'origine) j'en reviens à cette conclusion que j'avais anticipée: "le voyage pour le voyage", style grandes vacances, a été effectivement une phase intermédiaire pour me déconnecter d'un ancien mode de vie, une sorte de grande parenthèse, qui en plus des plaisirs de la découverte m'a permis de réfléchir sur mes besoins fondamentaux, de relativiser ce qui parfois peut me chiffonner dans la vie quotidienne, de mieux connaître mes points forts et mes points faibles ... je ne sais pas encore quelles options je prendrai durablement, pour l'instant, je me reconstruis et reconstruis du lien social ...

Merci aux personnes qui m'ont suivie jusqu'à présent, merci à celles dont les commentaires m'ont bien soutenue, et merci à celles qui sont partantes pour la suite des aventures et ... de la réflexion ...

 

 

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Commentaires
S
C'était très intéressant de lire ces réflexions sincères. Bonne route sur la nouvelle étape de votre vie !
F
Merci monom, pour tes voeux ... Je continue à aimer le voyage et l'idée de voyage, et j'ai plein de destinations en tête encore !!! mais ça ne sera plus comme je l'ai fait là ... je me rends compte que j'avais fait un choix assez radical, en ne gardant aucun garde-fou derrière moi, mais je me félicite d'avoir su m'arrêter à temps ... en attendant la prochaine destination, je connais de magnifiques échappées belles sur ton blog extra !
M
Le voyage, seul ou pas, qu'il commence par un petit pas ou un grand, mène toujours quelque part. J'ai beaucoup voyagé, seul, en transport public, surtout en Amérique du Sud, et j'en garde un très bon souvenir. Mais comme toi je pense qu'à un moment ce voyage t’amène à te poser en ayant pas forcément réfléchi longtemps au point d’atterrissage.<br /> <br /> Tout du bon ;)
S
Une étape de vie se termine, une autre commence. Nul doute que tu nous décriras tes nouvelles destinées avec brio. Il fait bon parfois, de faire une pause, de recentrer ses attentes, ses envies. J'ai beaucoup aimé la franchise de ton billet, cette description sans chichi de tes aventures, de ce qui t'a poussé à poser tes valises, de tes déceptions. Formidable de sincérité et très émouvant aussi. Bon dimanche!
J
Re..<br /> <br /> J'allais presque oublier..<br /> <br /> L'illustration de Lucie Vandevelde est belle et représentative avec cette maison en partie droite et sans attache...Dass..allein sein will nicht sagen..Allein..bleiben...<br /> <br /> Manchmahl sucht mann einsamkeit um sich selbst zu finden..innerlich...<br /> <br /> Parfois, en apportant quelque chose aux autres, sans parler directement d'associations, on trouve la paix intérieure et le bonheur de donner une part de soi aux autres et sinon en partageant, des instants, des petits moments, des échanges, on retrouve la joie et sinon une joie..perdue ou que l'on croyait perdue à jamais.<br /> <br /> Le pauvre est plus riche que le riche, car il ne possède rien et se contente de ce qu'il a (pas le riche..éternel..insatisfait..), de plus, souvent le pauvre est prêt à donner le peu qu'il possède (il donnerait même sa propre chemise..) et son bonheur se lit sur son visage (l'expression de clarté, d'un visage qui est illuminé et qui illumine, de joie..).<br /> <br /> Le pauvre n'a aucun souci, du moins pas ceux du riche, on ne risque pas de l'envier, ni de lui prendre ce qu'il n'a pas...<br /> <br /> Jeder muss sein weg finden im Leben, und ein Sinn für sein Leben finden...
Les carnets de La Nomadeuse
  • Nomade je deviens ... jeune retraitée qui a encore plusieurs vies à vivre dans celle-ci, je laisse derrière moi la sédentarité, je pars à la découverte ... j'ai troqué ma maison contre une caravane, j'ai gardé mes crayons, mes couleurs, mon appareil photo.
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